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 déluge - salvaby

Gaby S. King
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Gaby S. King
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Elle a boutonné correctement sa chemise.
Sa chemise large et légère, comme un voile fin autour de sa silhouette, ce corps que l’on devine en contre-jour - la lourdeur de ses seins, la fragilité de ses hanches. Le parfum à la racine de ses cheveux, leurs reflets blonds qui coulent comme des fleuves le long de sa peau rousse de grains de beauté.

Elle a tourné la tête vers la fenêtre.
Et depuis le soleil la dévore - l’efface. Ses couleurs se diluent dans l’eau clair d’un rayon de soleil, ses traits deviennent incertains. Qu’est-ce qui lui appartient, encore ? Qu’est-ce qui la retient ? Ses paupières ont un soupir, obscurcissant ses iris bleus - ses pupilles. Ses pupilles ne reflètent pas la lumière de la scène. Ses pupilles sont deux disques noirs pétrole.
Son ombre, immense.
Elle éclabousse toute la pièce ; elle en frôle le pas de la porte, lèche le sol sur les mètres qui les séparent.

Elle a joint ses mains dans son dos.
Comme un professeur - oh Gaby, je te déteste. Tu n'avais pas le droit. Et pourtant je l'ai fait.
Je l'ai fait, pense-t-elle, et maintenant tais-toi.
Tais-toi, je sens la courbure de la Terre. J'entends les mers s'ouvrir, je vois le ciel frémir. Le déluge est là, Noé, et j'ai saboté ton radeau de bois ; tu ne m'emmèneras pas.
La fin du monde m'appartient.

« Il n'est pas là. »


Son regard s'est penché par-dessus son épaule pour lui offrir ces mots. Une onde dans sa voix - un sanglot.
Ses phalanges ont blanchi de cet aveu.

« Oh Salvatore... »


Elle se retourne sans bruit dans le brouhaha léger des autres - celui de la fenêtre, celui du couloir, de la vie là, dehors.
Dans cette pièce, personne ne respire.

« Que dois-je faire ? »


Et le bleu de ses yeux déborde, Kimimichi, parce qu'elle a si peur de ce que tu as fait. De ce que tu l'obliges à faire.

« Que dois-je faire ? » répète-elle dans un presque cri qui l'effraie elle-même.

Et ses mains dans son dos sont toujours jointes, comme si les désunir allait la briser, disloquer ses os de poupée - et quelle jolie poupée. L'épouvante l'habille si bien. Regarde-la, Salvatore. Regarde ton œuvre. Tout ça, c'est ta faute, parce que tu n'es pas raisonnable.

Mais elle ne l'est pas non plus.

Patiemment elle laisse glisser une larme muette sur sa joue pâle. Une, et une autre, jusqu'à ce que ton regard se trouble. Jusqu'à ce que la peur qu'elle joue fasse écho à ta peur naissante. Jusqu'à ce que ton visage ait la grimace qui lui plaît.

Diable qu'elle lui plaît.

Elle en a les prémices d'un rire dans la gorge, et au bord des cils. Elle le retient, à peine ; une seconde encore, et elle ne retient plus.

Il lui échappa dans une hystérie peu commune.
Salvatore Kimimichi
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Salvatore Kimimichi
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Il l'avait su dès qu'il avait passé le pas de la porte.
Elle le savait. Il l'avait su qu'elle le savait.

Dès lors que les mocassins turquoise s'étaient noyés dans son ombre.
Le soleil était triste.

C'était la saison des compétitions de surf. Les touristes arrivaient par centaines sur les plages et ils avaient prévu de passer le week-end prochain à Miami pour savoir ce que ça fait d'être au milieu d'une foule sans pouvoir respirer alors qu'on était dehors. Il y pensait parce qu'il voyait des planches baladées sous les bras par la fenêtre, nimbées de chaleur, encore salées. Son acuité visuelle était remarquable - rien ne pouvait lui échapper. Il pouvait tout voir, sauf lui. Puisqu'elle était là.

Son cartable en cuir avait disparu. Il était pourtant ici ce matin. Il aurait du être là.
À la place ils savaient et cette sagesse avait un goût amer. Le même qu'on sent quand on se gratte la gorge trop longtemps.

La sienne était écarlate et ses ongles bleus.

- Moi qui pensais que j'étais un salaud.

Elle raisonnait comme un écho.
Il essaya de se remémorer un Disney dans lequel le héros se retrouvait face à un méchant dégueulasse, un peu dans le genre. Rien ne lui vint en tête. Elle sonnait creux.

Son nom n'avait plus rien de noble une fois dans sa bouche. Sa langue n'avait jamais eu aucun honneur. Ca aussi, il le savait.
Peur, peut-être. Les larmes ne lui venaient pas. Elles auraient gelé au moindre contact avec l'extérieur.

Sa chemise était parfaitement boutonnée. On aurait pu s'y méprendre.

- Alors, qui dois-je prier pour mon salut ? Montrez-moi l'exemple.
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Gaby S. King
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Elle va en mourir.
Ça y est, elle en meurt.
Encore un peu, et elle en meurt.

Mais son cœur ne lâche pas - amertume. Les hoquets qui l’agitent ne sont pas encore assez forts pour lui déboîter les os ; le souffle lui revient, alors qu’elle pensait enfin l’avoir perdu. Elle y a cru, maintenant elle est un peu déçue.
La prochaine fois, peut-être ?
Ah, mais quand ? Et c’était si beau. L’occasion était si parfaite, le tableau si soigné - les acteurs si bons. Salvatore ne pleure pas ; bientôt il pleurera, ou peut-être que ce sera elle.

Lentement elle bat des paupières.

Oh, ce sera moi.
C’est toujours moi, à la toute fin, lorsque même la rumeur des autres finit par fuir mon silence et m’abandonne à moi-même ; mais moi-même, c’est un jouet cassé.
Un cheval de bois.

« Il n’y a pas de dieu pour nous, pécheurs. »


Nous, ça n’existe pas. Ils ne se ressemblent pas, mais le sous-entendre l’amuse - l’agace, aussi, elle ne sait pas choisir. Les pupilles pleines, elle le regarde, elle l’observe ; sans tendresse, elle le dissèque. Qu’a-t-il vu ? Qu’a-t-il aimé ? Comment l’a-t-il touché ? Elle a du mal à rester concentrée, un peu ; c’est qu’il la dégoûte.
Salvatore Kimimichi la répugne.
Elle est intimement persuadée que dans un monde parallèle, elle est son mac parce que tout ce qu’elle voit dans ses yeux, c’est l’argent qu’elle pourrait tirer de son petit cul pâle. Une bien jolie perspective d’avenir. Par chance elle n’est pas son conseiller référent, ou il serait déjà sur le marché et Aidan ne l’aurait pas retrouvé.
Elle l’aurait perdu - noyé.

Qu’espère-t-il ?

« J’ai envie de m’en vanter, Salvatore. »

C’est irrésistible.

« J’ai envie de le dire à tout Volfoni. »


Le hurler sur les toits.

« Mais plus que tout, j’ai envie de le dire à Aidan. »


Parce que je me demande ce qu’il protégera en premier. Toi, Salvatore, ou sa réputation. Toi, Salvatore, ou l’image qu’il offre au reste du monde.
Toi, Salvatore, ou lui-même.

Lui-même ?
Salvatore Kimimichi
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Le tic nerveux au coin des lèvres, celui qui s'agace promptement, n'existe pas. Il tient cela de son père. Chez les Kimimichi, on sait se tenir. Se le dire lui fait du bien et il accepte leur qualité de pécheurs. Vraiment, ce n'est rien. Il veut bien le reconnaître.
Plus de dehors. Il affronte son souffle pendant dans l'espoir de ne pas croiser ses yeux. L'avantage, au moins, c'est qu'il n'a pas à soutenir trop grande beauté - et sa chemise a trop de plis pour le troubler.

Chaque césure un poids à soutenir. Étrangement calme. De colère, certes.
Il reconnait qu'ils se ressemblent. La reconnait comme son égale.
Dehors - rien, c'est ici et maintenant. Ils se ressemblent. Il aurait fait la même chose, finalement. Pour se sentir exister il aurait fait la même chose. Juste retour.
Le karma, probablement.
Il était chrétien.
Il n'en tirait aucune fierté, ne pratiquait en rien, ne se définissait pas comme tel ; mais les deux dollars pour la grande bougie, il les donnait. Un truc de blanc et son cul était pâle.
Il exécrait le monstre qu'il avait été.

Il l'exécrait tellement qu'il avait envie de rire, sa gorge nouée grattée pour l'en empêcher comme si le corps savait qu'il n'y avait rien à en tirer. Les Kimimichi savent se tenir.

Il fait envie au mal et c'est un honneur.
Il entend dans le Sauveur le cliquetis de menottes.
Ne prononce pas son nom.
Voilà, c'est fait.

Il sourit tendrement. C'est l'effet qu'il lui fait. Il attend la suite sans vouloir l'entendre et la suite, c'est à lui de la tisser et d'abord il la sourit. Bienfaisance maîtrisée - il a été le monstre. Elle sait par où s'immiscer pour faire le plus de dégâts à l'intérieur, elle sait le faire parce qu'elle n'a que ça à faire. Connais-toi toi-même.

- C'est un honneur. Merci.

Pas de courbette. Il ne pousse pas le vice jusque là et n'était pas certain de rendre son théâtre parfaitement souple.

- C'est peut-être m'accorder trop de crédit, cela dit, et le prendre pour un imbécile. Il a remarqué mes coups d’œil avant vous.

Dieu merci.

Aidan a la forme d'une ancre. Immobile et droit, solide, inébranlable. Il a les embruns de l'eau dans les yeux, le sel des vagues contre la nuque, son trésor autour du téton, son allégorie au doigt. Elle protégerait son enfant - les voiles pouvaient s'arracher sous la tempête et les phares s'éteindre sur son passage, elle le garderait entre ses bras, il garderait son trésor près de son coeur battant, le soleil était triste. Il n'en revenait pas d'avoir trouvé saveur auprès d'un palais aussi gourmet.
Sonnait creux.
Estompa les contours les plus horribles de son sourire.

- Nous nous marierons à l'église. J'ai espoir.

J'ai foi.
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Elle a pouffé.
Si fort qu'elle a postillonné - alors elle essuie délicatement ses lèvres d'un doigt, l'air désolé, en se mangeant l'intérieur des joues car il semble y croire et elle ne voudrait pas le vexer.

C'est beau d'avoir des rêves.

Ah, mais on ne vit pas dans le meilleur des mondes, et celui-ci est si absurde ; enfin, ne s'en rend-il pas compte ? Ne voit-il pas à quel point tout ça paraît ridicule ? Pourquoi pense-t-il qu'elle a ri ? C'est la blague du siècle !

Salvatore et Aidan.
Aidan et Salvatore.

Oh non, l'hilarité revient. Vite, parle ; dis quelque chose ou tu vas rire encore, et tu as déjà des crampes.
Alors elle lui pose la question, celle qui l'intéresse le plus. Qui fait battre son cœur, qui lui chauffe le bas du ventre.

« Parce que vous avez un avenir ? »

Tu l'as lu dans une boule de cristal, petite catin ? Tu l'as prié sur une étoile filante ?

« Je veux dire, Salvatore ! Où vois-tu Aidan dans dix ans ? Qui vois-tu à son bras ? Toi ? »

Elle fronce légèrement les sourcils, plisse le front ; elle a pitié, un peu. Mais il faut qu'il l'entende, se dit-elle, et puis elle ne raconte rien d'extraordinaire. Des banalités de belle-mère.
Vipère.

« Toi, Salvatore, ou une épouse ? »


Et elle marque un silence, parce que maintenant elle n'a plus pitié ; elle brûle d'impatience, comme si elle était sur le point de lui révéler le secret de l'univers, de recréer le Big Bang.

« Il ne s'agit pas de toi, Salvatore. Pas de moi non plus. Il ne s'agit pas de nous deux. Personne n'achètera jamais le conte de notre rédemption, mais tout le monde adorera celui de la rencontre entre Aidan et sa femme. Imagine. Ce sera une bonne cuisinière, une enfant comme une douceur terrestre. Elle aura le teint frais, l'œil pur et prudent, les mains usées ; elle aura la patience d'une mère et la retenue d'une nonne. Elle sera belle, belle à tomber, dans ses manières très simples, sa timidité dévorante. Elle se cachera derrière l'homme que tu aimes comme on se cache derrière son père. Oh, peut-être qu'il ne la désirera pas comme il te désire. Mais qui épouse la putain ? Qui met une bague au fantasme ? Ça ne se fait pas, Salvatore, et tu sais comme il aime que tout reste dans les clous, que chaque chose soit à sa place. Tu n'es pas à ta place.
Mais elle y sera. Elle y sera car elle l'attendra, peu importe le chemin qu'il empruntera, elle sera là pour attendre son retour, réchauffer sa couche. Et les gens l'adoreront, parce qu'elle lui ira si bien - comme un gant, et il ne l'aura choisie que pour ça, abimé et harassé, car il est vieux Salvatore et qu'il a besoin d'une infirmière pour sa retraite, pas d'un problème de plus, un enfant terrifié qui a besoin qu'on le rassure et qui ne sait pas le rassurer en retour, qui prend mais qui donne si mal, si maladroitement, parce qu'il a si peur de donner à perte. Et tu as raison d'avoir peur, parce le temps que tu investiras dans Aidan, il ne te le rendra pas. Tu n'as que ta jeunesse à lui apporter, car c'est tout ce que tu es, jeune et amoureux. Tu n'as rien d'autre à offrir, et du peu que tu possèdes il se lassera. »

Elle reprend son souffle, les lèvres entrouvertes, le regard perdu ; il a dérivé vers le plafond, s'est accroché à une aspérité. Un défaut.

« Mais peut-être que je me trompe. »


Gaby ?

« Mais même si je me trompe, combien y a-t-il de chance que ça tombe sur toi ? »


Ouf.
Encore un peu, et tu étais raisonnable.

« Combien, quand on me ressemble ? »


Et ses yeux s'arrachent enfin au plafond, s'abîment dans le geste ; elle a le regard écorché vif, Gaby, et dans les mains des bouquets de fléaux, dans le corps des greniers de peste noire.
On aurait dû l'appeler Pandore, pour tout le malheur qu'elle déchaîne par simple curiosité.
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- Vous avez raison.

Un regard depuis bien longtemps détourné. Dans son soin méticuleux, il avait nettoyé le tableau au chiffon et avait oublié un stylo rouge, une manie qu'il lui avait emprunté. Il gardait espoir de retrouver un jour un tableau noir. Ce jour-là, il serait fier de sortir son paquet de craies neuves, en état d'hibernation avancé dans la poche avant de sa sacoche. Il pourrait alors récupérer tout ces stylos fatigués et les abandonner au fond d'une poubelle. L'émotion lui tira le coin des lèvres - il y a un an à peine, c'était ce qu'on appelait un sourire de fils de pute.

- Vous avez raison, renchérit l'écho de ses yeux sombres lorsqu'ils se posèrent sur elle, pathétiques de lassitude, épuisés de s'entendre dire ce qu'il s'était répété des mois durant. Ce qu'il se disait toujours, parfois, les nuits d'insomnie.
Elle lui était si prévisible qu'il en pâlit probablement.

Ses palabres avaient quelque chose de terrifiant, sans doute pas pour les bonnes raisons, mais ils se reconnaissaient déjà ; c'aurait été perdre son temps que chercher à comprendre ce que l'un voulait de l'autre. Tant qu'ils existaient l'un pour l'autre, c'était à peu près tout ce qu'il fallait comprendre. Tant qu'il se reconnaissait dans ses insultes, c'était qu'il pouvait y faire face la tête haute.
Il y avait quelque chose de faux dans la manière qu'il avait de la regarder. Un sentiment d'inconstance motivé par l'orgueil du savoir, par l'angoisse d'être plus friable qu'elle le sera jamais. S'il s'agissait seulement de confiance en soi, mais l'allié pouvait devenir un inconnu.
L'écouter d'une oreille. Pour cela, il était de profil, assis sur une des tables du premier rang. Elle pouvait voir ses yeux doux, l'élégant ourlet de ses lèvres humides d'être mordues, sa gorge rouge de griffure. Autour des doigts ses propres cheveux.

- C'est même déjà arrivé, j'en suis certain. Qu'il se soit lassé, j'entends. Je ne suis pas d'excellente compagnie. Pas particulièrement mature ou intelligent, pas spécialement beau non plus, plus si jeune que ça, mais j'imagine que vous savez déjà tout. Probablement que dans dix ans il aura une femme magnifique à son bras, et que ça lui ira mieux au teint. Probablement qu'elle ferait mieux de savoir cuisiner autre chose que du riz et rester à sa place à se dévouer à son bonheur comme il se dévouera au sien, que la couche nuptiale sera animée d'une verve nouvelle, que le quotidien sera ordonné, chaque chose à sa place. Il sera mieux avec elle qu'avec un gamin, c'est même certain.

Ce qu'il y avait de plus dur à encaisser, c'était le portrait qu'elle en dressait.
L'idée qu'elle vienne à lui ressembler - qu'il lui ressemble, plutôt - allait de soi. Qu'elle en vienne à se comparer à lui, c'était autre chose.
Elle était aussi viciée que le carbone qu'elle expirait, ses cheveux en devenaient ternes. Lui haussait les épaules, guidait une main rayonnante contre son oreille percée, arrangea une mèche de cheveux en douceur - le regard tendre d'un éclat solaire. Il aurait aimé déborder de quelque vive passion, lui aussi ; son procès semblait déchaîner les âmes. La sienne s'était éteinte dans les restes du foyer encore chaud et s'était changée en charbon.

- Et pourtant, cette discussion devait avoir lieu. Vous y teniez, vous avez rusé pour l'avoir, et je suis là.

Des lèvres blanches.

- Tant d'attention pour une putain, je vais rougir.

Blanches.

- Il faut croire que j'ai de la veine. Vous n'étiez pas si loin.

Blanches.
Les mots lui manquèrent, son estomac grouillant soudain de la même haine, parfaitement calme, qui habite les roues usées, les vieilles chaussures, les cordes épaisses qui retiennent les voiles. Et par cette sagesse que le silence apportait avec lui, il décida de reconnaître le monstre qu'il aurait pu être s'il n'avait pas été cette putain à la fortune diabolique, de pardonner son aigreur et sa solitude, et de lui montrer la porte du menton et le sourire de l'immaculé.

- Vous pouvez aller le trouver si vous voulez. Vous savez mieux que moi où il peut bien être.
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Elle a fait un pas.
Un pas comme pour sortir, comme pour aller le trouver, puisqu’on l’y avait si humblement autorisée ; et pourtant elle ne traverse pas le seuil de la porte. Elle s’immobilise silencieusement à hauteur de Salvatore, cogne son genou au pied de la table sur laquelle il est assis, pose une main contre son bois ; glisse son visage dans le creux de son cou, mais sans le toucher, sans même l’effleurer. Elle se colle juste là, au plus près de sa chaleur, et elle sent son odeur contre sa joue, son souffle sur ses cils, et quelque part elle n’est toujours pas satisfaite, mais elle ne se risquera pas à marquer sa peau. Elle est trop près, déjà, pour que ça soit agréable ; mais pas encore assez, pour que ça soit tabou.
Ni bien, ni mal, mais c’est là, elle est là et elle ne bougera pas.
Elle a une question, encore - peut-être la dernière.
Elle ne saurait pas dormir sans savoir.  

« Et si... »

Elle défaille un peu, plante ses ongles dans la table. Un frisson parcourt son échine, fait frémir son ombre. Elle a l’impression de faire une erreur, mais c’est irrésistible, c’est sur le bout de sa langue et ça a la couleur d’un secret.

« Et si c’est toi qui te lasses ? »

Et si finalement, Salvatore, il ne s’agissait pas d’Aidan. Pas d’elle non plus. S’il s’agissait pas d’eux deux, car personne n’achètera l’histoire de leur rédemption.

A quoi ressemble l’éternité quand on a vingt ans ?

Une cage en verre ? On n’en voit pas les parois jusqu’à ce que l’on essaie d’en sortir, jusqu’à ce qu’on en macule notre bile, et le seul qui a la clé l’a avalé et on le déteste de nous avoir piégés - mais de là à l’éventrer ? Ses pensées s’emmêlent, s’entredévorent.

A quoi ressemble l’homme que l’on aime quand on a vingt ans ?

Avant de le connaître au quotidien, jour par jour, avant de le soigner malade et de le soutenir pendant son chômage, de passer l’éponge sur ses habitudes les plus sales, ses fantasmes les plus interdits, avant de laver son linge, de préparer son repas, de chauffer sa couche ? Avant de se perdre dans son odeur jusqu’à l’identifier comme la sienne, d’avoir enroulé autour de sa colonne vertébrale son ADN, avant de l’avoir haï à en crever, avant d’avoir pleuré la nuit alors qu’il était à vos côtés, avant d’avoir couru et de ne pas l’avoir vu vous courir après ? A quoi ressemble l’homme que l’on aime quand il ne vous a pas encore trahi, qu’il n’est pas encore passé à deux doigts de vous détruire ? Avant de s’en rendre compte à quel point il n’est qu’un enfant, avant de se rendre compte que vous ne grandirez jamais vraiment, mais que le temps passe et que votre patience se fane, que sa colère est sa maîtresse et qu’elle vole votre place dans le lit - avant de subir, car chaque fois ses mots résonnent si fort et le pardon paraît si lointain ? Avant de l’aimer à court d’excuses, à bout de compromis, de l’aimer dans son apparence la plus fragile, d’embrasser les genoux qu’il écorche dans la boue ? Avant de ne pas pouvoir s’en défaire, et d’en souffrir qu’il vous aime, car c’est bien la seule qualité qu’il lui reste ?

C’est la seule qualité qu’il lui reste.

Et si, Salvatore, si c’est toi qui le quittes ?
Si c’était toi.

Y as-tu pensé ?

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Son souffle se rapprocha et il recula instantanément. Ses bras prirent la peine de reculer, son buste aussi ; sa torsion était souple mais ferme. Tonique. Elle était immonde et tout son corps l'avait compris, plus vite que son esprit peut-être.
Il y avait dans sa voix l'attention lascive, les recours froids et pourtant si réconfortants de l'imposture. Elle aurait pu être une belle personne, un esprit vif et épanoui, si elle n'était pas si vénéneuse.
Dehors il n'y avait personne. Le soleil tapait sur les carreaux pour ne pas les voir, pour respecter leur intimité. Salvatore ferma les yeux et ne se vit plus.

- Alors je viendrai vous demander conseil.

La tête échancrée, la nuque tordue, cherchaient de l'air ailleurs que dans celui, vicié, qu'elle partageait. Parfaitement immobile. Chacun attendait que l'univers se stabilise à nouveau, et sa déglutition sonore lui fit marquer un but dans son propre camp.

- Qu'est-il arrivé ? Quel mal venu du ciel ou de la terre vous a façonné telle quel vous êtes... ?

La voix étrangement calme. Elle venait de trouver sa vocation de prêche.

- Personne n'aime les histoires de rédemption. On est beaucoup plus pervers et voyeurs que ça, on aime ce qui se détruit, ce qui fait mal, on aime avoir pitié des autres pour moins avoir pitié de nous et on est heureux de blesser. On crée des péripéties qui font du mal et tout le monde préfère les descentes aux montées parce qu'elles sont moins dures à finir.

Fin XIX° siècle, les gens en France n'en pouvaient plus du réalisme et de sa misère, alors ils ont privilégié le surréalisme. Il sortait avec un prof de littérature et il comprenait maintenant pourquoi il avait tenu à garder son poste.

- C'est fatiguant de tomber. Je suis fatigué.

Elle avait gagné.
Elle avait raison, elle avait gagné. Son regard était dur, les larmes sèches depuis longtemps, le coeur au bord des lèvres pour le simple plaisir de lui laisser palper ce pourquoi elle vivait. Être unique, plus intelligent, c'était accepter d'avoir raison et que cette raison soit inconnue de chacun sauf de soi. Il ne savait pas s'il avait raison, mais ça avait le mérite d'être rassurant.

- Mon monde était sourd. Sourd et hermétique et le seul qui me répondait, c'était mon ego en écho. Et vous ?

Dites-moi ce que vous avez gagné.
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