Tran, Yo man

▷Un corps un peu trop slim, des traits un peu trop fins, et comble de tout, une peau toute blanche à l’allure délicate, et c’est pas une fille. C’est pas une fille, c’est un mec. C’est un mec qui se fight. C’est un mec qui parle sans aucun tact. Y’a eu un blem dans sa conception. On sait bien que les asiat’ ont la particularité d’être efféminés, surtout quand on regarde les idoles. Mais quand même. Déjà il est tout petit, il dépasse pas les 1m65, puis il a la peau douce ça se voit même à 5km à la ronde. Doux c’pour les meufs. En parlant de peau, elle est super clean, la mousse à raser n’a jamais effleuré les pores trop petits de sa peau pour accueillir les impuretés. Y’a pas de poils, y’a pas de trucs virils. Mais y’a pas que ça qui fait de lui un mec pas viril. Il est maigre, 56 kg tout mouillé. Bref, ouais il est mignon, il fait gay aussi… AHH.

Mais c’est un truc inimaginable, genre lui avec un gars. P’têtre dans ses rêves pornos, et encore. C’est affreux. Il est maudit hein ? C’pour ça qu’il fait son dur. D’ailleurs, ça commence par son corps. Sa peau blanche est masquée sur ses bras par des tatouages ; on dit des tatouages indiens que c’est pour représenter le passage à l’adulte. Enfin bref. Mis à part les décorations sur son corps, il porte des baggys, des casquettes, un brassard au poignet, style éponge noire et des t-shirts trop larges pour le style, même si en fait, il a trop une petite taille pour trouver des vêtements qui ne flottent pas beaucoup. Il envisage de se faire tatouer « fuck ya » sur les phalanges mais il attend pour manque de thune.
Chance ou pas, son joli minois est souvent accompagné d’un pansement, soit sur le pif, ou sur l’arcade sourcilière parce qu’il se bat souvent. Aussi, il n’est pas rare de voir sa peau teintée de bleus, de bandages ou de coups. C’est un peu sa manière d’habiller la peau trop blanche qu’il traîne depuis sa naissance. Tran, c’est un homme…il aurait toujours dû être un homme… Mais il fait poupée. Même si on peut considérer qu'il a de la force, ses combats, il les gagne surtout parce qu'il se faufile partout et qu'il a une bonne droite, grâce au baseball, sport qu'il adore et pour lequel il se donne à fond. Mais en fait, c'est surtout grâce à Caleigh qui, au fond, fait trop peur aux autres, et qui du coup, parfois, le laissent gagner ! Mais ça, Tran ne se l'imagine pas, pour lui, c'est clair qu'il est trop un boss.

▷ Tran c’est un peu le petit chien qui aboie fort. Parce qu’il est petit, et démarre au quart de tour. Faut avouer que c’est pas facile d’afficher sa virilité avec un corps de nana, ou d’andro, mais ça revient au même, on ne croit pas un gringalet à l’allure toute frêle et qui manque de se salir dès qu’on pose un doigt sur lui. Arf. Alors il doit toujours faire plus que les autres mecs pour qu’il soit un minimum crédible… C’est assez fatigant, assez lassant, mais il doit être un homme, il en est un anatomiquement parlant, mais le fait est qu’on se fout de sa gueule.
Il n’est pas très malin, d’ailleurs ça se sent au niveau des notes qui tournent autour de 7/20 dans le meilleur des cas. Il ne va pas non plus chercher très loin quand il s’agit de la réalité des choses, de toute manière. Ce qui compte pour lui c’est avant tout son « crew » avec qui il est très lié. N’ayant pas eu de vraie famille, il a réellement trouvé son refuge avec eux. Et même si montrer ses sentiments est over pas viril, il les adore dans son pichtit cœur et fait tout pour être digne d’eux. Parce qu’ils sont le soutient qu’il n’a jamais vraiment eu, parce qu’ils sont la virilité qu’il veut imiter et le modèle qu’il n’a jamais pu copier. Mais la chose à laquelle il tient le plus, et le point d’honneur sur lequel il s’est juré de respecter, c’est de faire en sorte qu’une fille, une femme, une femelle ne soit jamais soumise. Sans aucun doute parce qu’il a vu les coups envers une femme briser à jamais sa vie. Pare qu’il en est totalement atteint et parce qu’il a toujours du mal à se remettre de la fin tragique qu’il a vue. A cause de ça, il est ce qu’il est maintenant, un gamin en quête de reconnaissance, et en quête de pardon. De pardon ouais. Des fois la nuit, il murmure des « pardon maman » parce qu’il n’a pas été à la hauteur, bien que gosse, de protéger sa bienfaitrice, de protéger sa propre mère, c’est dur hein. Le plus dur, c’est qu’il a ses traits et que tous les matins dans le miroir, il la voit.
Paradoxalement, y'a une seule fille qu'il ne défend pas, c'est sa copine, parce qu'en vérité, c'est plutôt elle qui le défend. Et parce que ça va à l'encontre de ses principes, il fait genre que c'pas elle le bonhomme, même si on sent bien qu'au fond de lui, y'a une gêne vis-à-vis d'elle.

Mais bon, son joli minois fait qu’il attire les filles qui kyakyatent autour de lui. Elles ont un côté rassurant.. malgré tout, un côté maternel qu'il aime bien. Depuis son entrée à Volfoni, pour tout dire, il a calmé son côté délinquant des rues. Parce qu’il y a trouvé sa place, et sa communauté. C’est une bonne chose sa venue ici, ouais..ouais. Par contre il ne le dira jamais, qu’il est heureux ici par le baseball, sa bande, les filles et sa nana. Malgré tout, même s'il ne reste pas énormément avec elle, il tient à cette nana. Par fierté démesurée, il ne reste pas avec elle, non pas parce qu'il a honte d'être à côté d'elle, mais en fait un peu, oui. Trop petit, il a carrément pas l'air viril et puissant. Alors il évite un peu d'être avec elle quand il le peut. Il ne se sent pas forcément à l'aise puisqu'il perd pratiquement toute crédibilité avec elle, et se fait tout petit...En plus après, on se fout de sa gueule. TSEH.

▷ « Je t’en prie arrête…pas la peine de te mettre dans des états pareils, je t’assure, c’était rien, juste un verre et… »
Et un coup. Un autre. Ça retentissait dans le salon comme des boulets de canons assourdis. Ça tombait, ça frappait, ça blessait. Ça blessait beaucoup parfois, et ça faisait peur aussi. Même si ça arrivait souvent, on ne s’y habituait pas. Dans son lit, sous les couvertures, ce n’était pas des monstres imaginaires dont il se cachait mais bel et bien du véritable monstre qu’il avait prit l’habitude de nommer « papa. »  C’était aussi un monstre avec qui il avait prit l’habitude de vivre. Il avait prit aussi l’habitude de vivre avec un autre démon, celui de l’alcool qui affaiblissait de plus en plus la seule figure qui se voulait rassurante dans cette maison aux murs tremblants sous la violence. Avant, il avait une vie plutôt normale, avec des parents pas trop anormaux, c’est juste qu’au fil du temps, il avait déconné et elle avait succombé.

Il était encore jeune quand ce moment fatidique arriva, ce moment où sa vie changea du tout au tout, et qui traça sa vie fatalement. C’était le soir, 20h avaient sonné et Tran Yo venait d’être couché. C’était le schéma classique d’une soirée, pour permettre au fils de bien récupérer de sa journée, et pour laisser du temps aux parents d’être tous les deux. On aurait tendance à penser que c’était pour se lover l’un contre l’autre, mais c’était surtout une manière de l’éloigner de toute cette violence qu’il entendait pourtant, dans sa chambre où la lumière du couloir filtrait légèrement.

- « Kwan a-arrête, c’était rien, ça va s’arranger tu sais, tu vas retrouver un taff et …
- Et quoi ? T’es conne ou bien ? Tu crois que c’est avec tes phrases à la con que j’vais faire quelque chsoe ? Et je t’interdis d’essayer de me remonter le moral, j’vais bien imbécile, t’es vraiment conne, conne, conne et super conne, putain ! Je vais bien ! Moi je vais bien, c’pas comme toi qui te saoules comme un bourrin putain, tu me fais honte AHH !
- Du calme, du calme Kwan, j’essaie juste de…et puis je bois pas tant que ça tu sais…c’est raisonnable..
- Raisonnable mon cul ouais ! Tu sais où tu peux te les foutre tes putain de bouteilles ? Dans ta face »dit-il en attrapant l’une d’elle pour la lancer sur Sae Hee, la mère, son épouse.
Elle tenta de l’esquiver, mais elle cogna contre son épaule et poitrine auxquelles elle mena une main. Tout ça lui arracha quelques sanglots et rapidement, elle se leva pour fermer la porte du salon, levant les yeux vers le premier étage dans une petite pensée pour son fils.

- « Kwan…ma bouteille.. elle m’a coûté…
- Parce que t’as dépensé pas mal de fric dans cette connerie ? Putain mais j’hallucine ! »

Et comme d’habitude, les murs recommencèrent à trembler, en symbiose avec le corps de Tran. Cependant, tout dura plus longtemps. Sae avait vu, il y avait de cela quelques jours, un psychologue pour l’aider à faire avancer sa famille. Parce que même si l’alcool était un démon bien prenant, le fait était qu’il y avait Tran dans leur vie, et qu’il était son bébé, son fils, son « petit amour » et qu’il devait grandir dans ce qui pouvait s’apparenter à quelque chose de plus ou moins sain. Elle avait bien conscience que c’était loin d’être le cas. Alors elle avait tenté plus que de mesure de rassurer, calmer son mari. Le problème majeur était que ça ne fit qu’empirer les choses. Tenter de le calmer était presque un acte suicidaire parce qu’il était du genre à avoir trop de superbe pour s’abaisser à être aidé.

Penché sur elle, un dernier coup, un dernier sanglot jaillit, et le silence dévora la pièce avant d’être coupé par un bruit sourd. Le corps de Sae venait de tomber à terre. Autour, il y avait de nombreuses bouteilles vides, les mains de Kwan puaient l’alcool et son souffle était fort, à moitié courbé. Doucement, il se redressa pour aller s’asseoir dans son fauteuil, les bras ballants, le regard vide et pourtant…un sourire satisfait aux lèvres. « Enfin, du calme »
Sans vraiment trop croire à ce qu’il venait de faire, il attrapa sa femme, comme souvent, et la mena dans leur chambre pour l’allonger dans le lit. Il se coucha et lendemain :

« Non… Sae…putain réveille toi »

Dans sa chambre, Tran n’avait pas bougé, il avait peu dormi aussi et n’osait pas sortir. D’habitude, c’était sa mère qui venait le chercher, mais ce matin, elle n’était pas venue. A sa place, son père, et c’est la boule au ventre qu’il se leva et le suivit où, en bas, de nombreux hommes en uniformes s’y trouvèrent. Il eut à peine le temps de tourner la tête vers le corps couvert de plastique qui s’en allait hors de la maison, qu'il murmura dans le vide un « maman » et tout se mélangea dans sa tête parce que tout alla très vite. Si vite qu’on l’envoya, dans les semaines qui suivirent, dans une famille d’accueil, loin de son père, seule famille restante. L’enterrement n’avait même pas encore eu lieu.

Là-bas, bien que la famille soit gentille, il pleurait souvent, dormait peu et demandait régulièrement sa mère voire son père. Il rentrait plus tôt de l’école à cause de quelques crises de larmes, ses camarades, ignorants de son histoire, se moquaient de ses faiblesses.

Le procès avait mit beaucoup de temps pour arriver à sa fin. Presque deux ans, durant lesquels Tran Yo était toujours dans l’orphelinat où finalement, il avait apprit à se défendre, ou plutôt à combattre. Parce qu’à l’orphelinat, ce n’était pas un cocon où tout était donné, la plupart des enfants étaient aussi tristes que lui et aussi désespérés de savoir que leur vie était affreuse, dés le commencement. Pourtant, il ne cessait de murmurer dans le silence de la nuit « maman. »

Parfois, il se plaisait à s’imaginer qu’elle passerait la porte de l’orphelinat pour qu’elle le récupère et le réconforte. Quelques années plus tard on vint le chercher oui, mais ce n’était pas sa mère, c’était son père sorti de prison. Ce n’était pas ce qu’il avait tant espéré, mais avait suivi.

La vie n’était pas pareille, même si au fil des années, une présence féminine s’était de nouveau installée. Il n’avait pas comprit pourquoi son père avait autant changé avec elle. Il n’avait pas non plus comprit pourquoi il avait l’impression d’être de trop dans cette nouvelle vie. Alors, vers l’âge de ses 13 ans, là où il pouvait sortir avec des amis peu fréquentables (parce qu’ils étaient placés dans la catégorie « mauvais garçons » ) il s’habitua à sortir de plus en plus tard au fil des années, et à faire autant de conneries qu’eux. C’était pas bien compliqué de se battre. L’un d’entre eux eut une plus grande influence. Il faisait du Baseball, et était le leader du groupe. Petit à petit il le copia, ayant besoin d’une figure forte et  rassurante, pas comme son monstre de père qu’il haïssait de plus en plus. Parfois, il jetait des coups d’œil à la porte de sa chambre avant de détourner le regard, en repensant à sa mère. Dans ces moments là, il se laissait aller à des bads, accusant intérieurement son père. Les juges ne savaient pas ce qui se tramait réellement chez eux, avant…Alors…alors la vérité n’avait pas été établie. Mais ça n’était pas le seul point affreux de l’histoire. Déjà guidé par sa bande, Tran devenait de plus en plus violent, surtout quand le père commença à battre sa nouvelle épouse avec qui il finit par divorcer.
Ces nouveaux coups avaient été…pour lui des frappes indirectes quant à sa personne. Ça lui foutait un « coup » au moral, se sentant faible face à lui, incapable de protéger une femme au final. Alors il avait commencé à s’arracher la peau des bras sous la nervosité qui grandissait en lui, à force de se les gratter fort, seul dans sa chambre, en face de la photo de sa mère. Il se bandait les bras avant de sortir avant que son leader ne lui donne l’idée de se faire tatouer, parce que lui-même le faisait. Il rentra avec, fièrement. Son père avait failli lever la main sur lui, mais s’était rabattu sur la commode. Après quoi, il avait prit la décision de changer carrément de vie et de partir en Corée du Nord.

- « Quoi ? Mais tu déconnes Kwan !
- Tu fais ce que je veux, tu me fais chier, t’as pas à discuter.
- Tu sers à rien ! t’as jamais rien fait pour moi, t’crois j’vais bouger de ma ville pour te suivre faire tes conneries comme ça ? Mais t’as cru j’étais qui ?
- Que t’es à moi, tu discutes pas, tu fais pas chier et tout se passera bien.
- Faut pas déconnnnnner làà ! »

Ils se disputèrent un long moment encore. Kwan avait essayé de le forcer à déjà faire des cartons, et à bout de nerfs, l’avait frappé. Alors là…là, Tran avait remonté ses manches et le frappa, encore et encore, jusqu’à ce qu’il pose les genoux au sol. Ses mains étaient en sang, il avait le regard noir et le souffle fort. Le père était agenouillé, blessé à la tête surtout. Les jours qui suivirent, il fut bien obligé de faire ses valises pour partir à Volfoni, expulsé de chez lui. Il n’avait pas pu emmener la photo de sa mère parce que Kwan l’avait pressé de dégager.

Après, sa vie là-bas s'était considérablement améliorée une fois que Caleigh soit sa copine. C'est à vrai dire tout simplement grâce à elle qu'il est devenue meilleur. Finies les emmerdes, bye bye les gros foutages de gueule... C'était tellement simple d'avoir une vie tranquille avec elle dans les parages. Malgré tout, une gêne subsistait quand justement elle était à ses côtés. Totalement bouffé par l'aura incroyable de sa copine, il passait et passe toujours pour un minus, un petit animal de compagnie à la limite ! Et ça c'était juste affreux. En plus, il ne pouvait même pas la défendre, ni s'occuper d'elle comme un vrai mec. Parfois, il avait la vague impression d'être un jouet, mais cette idée passait vite, parce qu'au fond, Caleigh, il l'aimait beaucoup, à distance ou quand il n'y avait personne, question de fierté. Elle n'est pourtant pas au courant de sa playlist "Beuh" !
Sa vie là-bas se fit plus libre et un peu plus joyeuse, parce qu’il se sentait surtout entouré et aimé. C’était un sentiment perdu depuis la mort de sa mère. Et pour garder son souvenir, et pour lui prouver qu’il était devenu plus fort, il s’était juré de protéger les femmes qu’il voyait en danger… et de vouer une haine incommensurable envers son père. « Qu’il crève comme un chien ce fils de pute, je refuse son existence, j’ai pas de père » disait-il parfois.